Notre position est 39'9' au nord de l'équateur
et 9° à l'est du méridien de Greenwich. Ici le ciel est transparent, la mer couleur saphir et lapis-lazuli, les falaises de granit or et argent, la végétation riche d'odeurs. Sur la colline, dans les lopins de terre arrachés au maquis qu'on cultive entre leurs murets de pierre sèche, le printemps resplendit du blanc des fleurs d'amandiers, l'été du rouge des tomates et l'hiver de l'éclat des citrons.
Le décor est planté : les couleurs sont précieuses, intenses et transparentes, les cinq sens sont en éveil, les quatre éléments sont réunis, on donne à la terre et elle nous le rend bien.
Notre position ... Notre ? Qui est "nous" ?
Mais tant de beauté souvent nous ennuie, Madame et moi, un désir de monde anormal nous envahit et la nervosité nous gagne. Alors pour nous défouler, s'il est impossible d'aller en ville, on fait des trucs un peu fous ...
Les premiers personnages sont entrés, apportant avec eux le désir, la nervosité, l'anormalité, le défoulement (donc la frustration), l'impossibilité et la petite folie, dans ce décor de carte postale.
Voici les premières lignes de Battement d'ailes de Milena AGUS. Comme dans Mon voisin, les personnages n'ont souvent pas de noms : moi, maman, grand-père, le fils des voisins, l'amant premier, l'amant second, ma tante, l'ex-femme de l'amant, etc ...
Les animaux, eux, ont droit à cette coquetterie : Amalia la jument, Niki niki le coq.
Et aussi certains humains "anormaux" : Pietrino, le petit dernier des voisins, un "drôle", Giovanni parce qu'il est tellement amoureux de Madame qu'il est capable de l'épouser sans autre raison, et Madame nommée Agnese par Giovanni maintenant qu'elle est aimée ...
On flotte dans ce monde oublié de tous, sauf des promoteurs et des fantômes, comme en apesanteur ; un coin de terre où la folie est salutaire, où les visions servent de guide, où les tarots façonnent les pensées magiques, où papa me rend visite en battant des ailes.
A découvrir ... si ce n'est déjà fait !
2008 pour la traduction française réalisée par Dominique Vittoz.